
L’Alliance pour la révolution verte en Afrique (AGRA) a organisé, du 13 au 15 février 2025 à Tenado dans la région du Centre-Ouest, une formation visant à intégrer la dimension genre dans l’agriculture. Destinée aux producteurs et productrices, cette initiative entend réduire les inégalités et améliorer l’accès des femmes aux ressources et aux opportunités agricoles.
L’accès aux ressources agricoles reste inégal entre hommes et femmes au Burkina, freinant la productivité et le développement du secteur. Pour y remédier, l’Alliance pour la révolution verte en Afrique organise une formation du 13 au 15 février 2025 à Ténado, dans la province du Sanguié. Vingt-cinq participants, dont 16 femmes et 9 hommes, ont participé à cette session visant à promouvoir une agriculture plus inclusive.
Selon Assétou Kaboré, consultante principale de la formation, le choix de Ténado n’est pas anodin. La région du Centre-Ouest fait partie de la zone d’intervention du projet AGRA et l’agriculture y joue un rôle clé dans l’économie locale. Toutefois, les disparités de genre y restent marquées.
Elle dit que « ce choix s’explique par le dynamisme des producteurs, notamment les femmes, très actives dans la maraîcherculture. Elles constituent une part essentielle du secteur, mais rencontrent encore des obstacles dans l’accès aux terres, aux crédits et aux intrants agricoles. »
Pour elle, « cette session vise à sensibiliser les producteurs et productrices sur les concepts de genre et leur impact sur l’agriculture, à identifier les inégalités existantes et à proposer des solutions adaptées. L’accent est également mis sur l’importance d’une participation équitable des femmes et des jeunes dans la prise de décision et le contrôle des ressources. »
Elle précise que « l’intégration du genre dans les activités agricoles est une priorité. Il est crucial d’expliquer les concepts de genre, d’identifier les inégalités et de proposer des stratégies adaptées pour les réduire. »
Toutefois, les productrices restent confrontées à plusieurs défis. « L’accès limité à la terre, le manque de mécanisation, l’absence de coopératives, les difficultés de financement et le poids des tâches domestiques freinent leur développement. L’analphabétisme et l’insécurité aggravent la situation », explique la formatrice.
AGRA entend aller au-delà de cette formation en mettant en place des actions concrètes. AGRA prévoit un suivi post-formation pour s’assurer de la mise en œuvre des recommandations.
Parmi les actions envisagées, « il est prévu de sensibiliser les autorités locales pour un meilleur accès des femmes aux terres agricoles, de renforcer les formations en techniques agricoles et en gestion, et d’instaurer des mécanismes de financement inclusifs. », indique Mme Kaboré.
Elle insiste également sur la nécessité de pérenniser l’initiative. « Il serait pertinent d’organiser d’autres sessions de formation et de répliquer des modèles comme les champs-écoles et les clubs Dimitra de la FAO, qui sont des références en matière d’intégration du genre dans l’agriculture. »

Elle a fait savoir que cette rencontre marque ainsi un premier pas vers une meilleure inclusion des femmes dans les dynamiques agricoles locales, avec l’ambition d’étendre cette approche à l’ensemble des 13 régions du Burkina.
Le rôle clé des femmes
Rasmata Ouédraogo, agent d’agriculture à Tenado, salue cette initiative qui répond aux défis rencontrés sur le terrain. Elle a souligné le rôle clé des femmes dans le secteur : « En plus des problèmes liés à l’accès à la terre, il est important de rappeler que les femmes jouent un rôle central dans l’agriculture. Elles contribuent à la réduction de la pauvreté, à l’accroissement de la production et assurent la sécurité alimentaire. »
Au fil des échanges, les participantes ont pris conscience des avancées en matière d’accès à la terre. « Ce que je retiens, c’est qu’auparavant, les femmes ne pouvaient pas obtenir de terres pour cultiver. Mais aujourd’hui, c’est possible », souligne Augustine Kanyala, productrice maraîchère.
Elle espère que cette dynamique se poursuivra et permettra aux femmes de pleinement jouer leur rôle dans le secteur agricole. « Nous prions pour que nous ayons la permission de demander des terres aux hommes afin de travailler et subvenir à nos besoins. »
Isabelle Kanko, une autre productrice maraîchère, voit en cette initiative une opportunité précieuse. « J’ai toujours eu du mal à accéder aux terres et aux financements. Grâce à cette formation, je comprends mieux les démarches à suivre pour défendre nos droits et améliorer notre production », confie-t-elle. Elle exprime également sa gratitude envers les organisateurs.
Si les femmes ont salué cette formation comme une avancée pour leur autonomie, les hommes ont également pris conscience de l’importance de l’inclusion. Joseph-Marie Bationo, président de l’union des producteurs d’oignons de Ténado, reconnaît les bénéfices de cette initiative. « Nous avons beaucoup appris sur l’importance d’une répartition équitable des ressources entre hommes et femmes. Il est essentiel que nous, producteurs, soutenions nos épouses et collaboratrices pour un meilleur rendement. »
Au-delà des aspects fonciers, la formation a permis de briser certaines idées reçues sur la notion de genre. « Nous, on pensait que le concept du genre concernait uniquement les femmes. Mais grâce à la sensibilisation, nous avons compris que cela inclut aussi les hommes. »
Conscient des défis à relever, il insiste sur la nécessité de partager ces enseignements. « Vingt-cinq personnes formées, c’est peu. Nous devons sensibiliser la communauté pour promouvoir l’harmonie dans les familles et éviter les conflits », a-t-il relevé.
Paul Sawadogo
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