Le vendredi 26 octobre 2024, T. Gaoussou était devant le Tribunal de grande instance Ouaga 1 pour répondre des faits d’abus de confiance, faux et usage de faux en écriture de commerce, incitation à faux et usage de faux et blanchiment de capitaux. À la barre, l’accusé a nié les faits.
Courant Octobre 2023, K. Arouna prend contact avec T. Gaoussou pour des travaux de finition de son immeuble R+10. A cet effet, un contrat de 305 millions de FCFA est établi pour les travaux qui devrait s’exécuter en 4 mois. Le contrat stipule que K. Arouna doit verser 177 millions de FCFA représentant 58% du total à T. Gaouassou pour que celui-ci commence les travaux en l’occurrence, commander des matériaux depuis la Chine. K. Arouna s’exécute. Cependant, jusqu’à février 2024, les travaux ne sont pas encore terminés, pire T. Gaoussou demande à K. Arouna de verser le reliquat pour qu’il puisse terminer les travaux arguant être en manque de liquidité. Toute chose qui a conduit K. Arouna a porté plainte en juillet 2024.
A la barre, l’accusé a expliqué qu’il a utilisé les 177 millions de FCFA pour passer une commande en Chine et a reçu deux conteneurs de matériaux en janvier 2024 pour lancer les travaux et il restait un conteneur qui devrait venir toujours de la Chine. Ce dernier conteneur arrivera au port de Tema au Ghana, mais il n’avait pas d’argent pour accomplir les formalités de dédouanement et les frais de port. Et il a fait part de la situation à la victime.
K. Arouna pour sa part a expliqué qu’effectivement, il a débloqué 177 millions de FCFA pour que le prévenu puisse passer les commandes et lancer les travaux. Mais il a constaté que les matériaux qui devrait servir au revêtement à leur arrivée étaient de mauvaise qualité, il a alors demandé au prévenu de changer les matériaux au regard du standing de l’immeuble. C’est là, raconte K. Arouna, que le prévenu l’a fait part de l’arrivée du troisième conteneur et de ses difficultés de le faire sortir du port. Il a alors demandé au prévenu de lui mettre en contact avec son transitaire, chose qui a été faite. Ayant reçu le contact du transitaire, K. Arouna le met en relation avec son propre transitaire et c’est là, que le Transitaire de l’accusé a indiqué que T. Gaoussou lui devait la somme de deux millions 890 mille FCFA et que si cette somme n’était pas payée, le conteneur n’allait pas quitter le port.
Ces propos sont réfutés par l’accusé qui ne reconnaît pas devoir de l’argent à son transitaire encore moins demander à la victime de payer quoi que ce soit. Il martèle que c’est son transitaire qui a dit à K. Arouna que les 2 millions 890 mille FCFA représentaient les frais de transport et de port. Un jeu de ping-pong s’installe entre les deux protagonistes.
Il passe une commande de 135 millions...
Le Tribunal recadre les débats et s’appesantit sur l’utilisation des 177 millions de FCFA par le prévenu. À ce propos, il fait appel à un témoin B. Adama. C’est ce dernier qui a facilité la commande de T. Gaoussou en Chine. B. Adama explique alors qu’il est dans l’import-export. Il indique que l’accusé ne pouvant pas voyager en Chine avec du FCFA, il est venu déposer dans son bureau, les 177 millions de FCFA avant de se rendre en Chine et une fois en Chine, cette somme est convertie en Yuans Chinois. B. Adama confie que sur place en Chine, il a aidé l’accusé à passer une commande de 135 millions de FCFA et il restait 42 millions de FCFA. Il avoue qu’arriver à Ouagadougou, l’accusé l’a contacté pour lui dire de lui produire un bordereau de 177 millions de FCFA. Il lui a alors rétorqué qu’il lui était impossible de lui produire un tel document puisqu’ils ont effectué une commande de 135 millions de FCFA. B. Adama raconte que l’accusé l’a dit qu’il voulait le bordereau juste pour une question de comptabilité. C’est ainsi que T. Gaoussou l’a convaincu de faire le bordereau de 177 millions de FCFA pour qu’il puisse présenter à K. Arouna afin que celui-ci puisse débloquer le reliquat du contrat. L’accusé ne nie pas les déclarations du témoin. Mais à la question de savoir où sont passés les 42 millions de FCFA, il n’arrive pas à se justifier.
" Il a utilisé les 42 millions à des fins personnelles", selon l'Avocat de la victime.
Pour l’avocat de K. Arouna qui s’est constitué en partie civile, les faits sont d’une évidence implacable, l’accusé a utilisé les 42 millions de FCFA à des fins personnelles ce qui constitue alors l’infraction d’abus de confiance. La défense de la partie civile a fait observer que face au refus de son client à payer le reliquat, l’accusé l’a assigné devant le Tribunal du commerce pour non-exécution de termes de contrat. Et de noter que l’immeuble n’a pas pu être terminé pourtant, il y avait une banque de la place qui avait manifesté son intérêt de louer trois niveaux de l’immeuble. Ce qui a conduit K. Arouna à contracter un prêt bancaire pour les travaux de finition. L’avocat de la partie civile fait savoir alors qu’à cause de la cupidité de l’accusé, son client a raté une belle opportunité. Sur l’abus de confiance, il a fait remarquer que l’accusé a reçu 177 millions de FCFA et a utilisé 135 millions de FCFA et n’arrive pas à justifier les 42 millions de FCFA manquant et qu’il n’a pas utilisé pour les formalités de transport. De plus, relève la partie civile, l’accusé a usé de faux en écriture de commerce pour se justifier et par la même occasion a incité T. Adama à produire du faux en écriture de commerce. Au titre du préjudice causé, la partie civile a réclamé le paiement des 42 millions de FCFA. Au titre des dommages-intérêts, elle a réclamé le paiement de la somme de 4 milliards 156 millions de FCFA pour le manque à gagner découlant du contrat de bail que la victime devrait passer avec la banque. L’avocat a confié que la banque était disposée à payer 415 millions de FCFA par an pour la location. Et ces 415 millions de FCFA devraient rapportés à la victime 4 milliards 156 millions de FCFA sur une période de 10 ans au minimum.
Pour le parquet, l’instruction a permis d’établir les faits d’abus de confiance, car sur les 177 millions de FCFA, le prévenu a dépensé 135 millions de FCFA et n’arrive pas à justifier les 42 millions de FCFA manquant. Sur les faits de faux en écritures et incitations à faux et usage de faux, le témoignage de B. Adama est assez éloquent et il n’y a pas de d’ambiguïté sur la question. Pour ce qui est du blanchiment de capitaux, le procureur a estimé qu’il ne disposait pas d’éléments probants qui prouvent la culpabilité de l’accusé, à cet effet, il a demandé la relaxe de l’accusé pour cette infraction. Par contre, pour les faits d’abus de confiance et faux et usage de fausses écritures et incitation de faux en écriture de commerce, le parquet a requis que l’accusé soit commandé à 48 mois de prison, dont 36 mois ferme et 500 000 FCFA d’amende.
"Il est difficile d'importer de materiaux en Chine en octobre-janvier", dixit l'Avocat de l'accusé.
Pour la défense, T. Gaoussou est victime de sa naïveté et de sa mauvaise appréciation du contexte chinois. Car a-t-il indiqué, tous les importateurs savent qu’octobre-janvier constitue la période des congés annuels en Chine et qu’en cette période, il est difficile d’importer de matériaux depuis la Chine. Ce qui n’a pas été pris en compte par son client et c’est cela qui explique le retard accusé dans les travaux. L’avocat de la défense a également indiqué que les 42 millions de FCFA ont été utilisés pour des frais connexes à savoir, les frais de transit, frais d’hôtel et pour les salaires des employés qui avaient déjà démarré les travaux. Du reste, la défense estime que l’accusation ne dispose pas d’éléments qui prouvent que les 42 millions de FCFA ont été dissipés. Mieux, il indique qu’aucune disposition dans le contrat ne stipule que l’accusé devrait justifier l’usage de l’argent perçu. La défense souligne par ailleurs qu’il n’y a pas de pré contrat entre la banque et la victime qui prouvent qu’effectivement la banque était réellement disposée à louer l’immeuble.
Le Tribunal a mis le verdict en délibéré pour le 29 octobre prochain.
Sam S
Zoodomail.com
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